Jean Goychman – Monsieur Hollande ose tout

Décidemment, François Hollande ne recule devant aucun mensonge, aussi criant soit-il. Il a lancé ce matin un appel à la vigilance pour le maintien de l’unité nationale. D’après lui, la principale menace qui pourrait détruire cette unité proviendrait du Front National. J’avoue que j’ai été surpris par la violence de cette attaque. Si effectivement le Front National est à ce point une menace pour l’intégrité de notre nation, pourquoi l’avoir fait prospérer autant en 1986 ? C’est quand même bien François Mitterrand, un prédécesseur souvent évoqué par l’ensemble du Parti Socialiste, de l’actuel président de la République, qui a décidé de son entrée à l’Assemblée Nationale. Plus qu’un acte de naissance officiel, c’était une véritable reconnaissance de la légitimité républicaine de ce mouvement politique.

S’il existe aujourd’hui une menace concernant l’unité nationale, ce n’est certainement pas du côté du Front National qu’il faut la chercher. Toute son action politique ne vise, au contraire, qu’à affirmer la pérennité de notre nation et à défendre sa souveraineté. Or, une nation possède deux attributs essentiels à son existence : un peuple et un Etat.

Or, et la Charte des Nations Unis pose en préambule la nécessaire souveraineté des Etats.

Nous constatons que depuis plusieurs décennies, les gouvernements successifs, qu’ils soient issus de la Gauche ou bien de ce que l’on désigne comme la « Droite républicaine » (probablement pour suggérer l’idée qu’il pourrait exister une droite non républicaine, sans toutefois s’aventurer jusqu’à la désigner) ont abandonné des pans entiers de cette souveraineté. Cette œuvre néfaste a commencé dès 1973, en abandonnant notre mode de financement des dépenses publiques, qui se faisait par émissions de bons du Trésor Public qui étaient directement achetés par la Banque de France, laquelle alimentait les caisses de l’Etat au moyen de billets émis en contrevaleur. Ce procédé, employé par l’immense majorité des pays du monde, évite aux contribuables de payer des intérêts sur ces sommes. Depuis 1973, nous avons payé sous forme d’intérêts versés aux marchés financiers à peu près l’équivalent de notre dette publique.

En 1992, le Traité de Maastricht est adopté par référendum, avec le soutien des deux formations politiques précédentes, non sans que certaines personnalités, tragiquement minoritaires, n’aient marqué leur opposition. Nous y avons perdu le contrôle de notre monnaie, attribut essentiel de la souveraineté. Or, Maastricht était en quelque sorte le droit que l’Allemagne devait acquitter pour obtenir le droit de sa réunification. C’est François Mitterrand qui avait proposé ce marché à Helmut Kohl dès 1989.

En 2005, le peuple français a refusé le traité portant sur une constitution européenne. En 2009, Nicolas Sarkozy, président de la République, a fait adopter par le Congrès le « Traité de Lisbonne ». Ce traité reprenait l’ensemble des dispositions contenues dans le projet de constitution, y compris les directives concernant les « travailleurs détachés » Dans ce Congrès, ne siégeaient que des parlementaires de cette droite appelée UMP à l’époque et du PS. La convergence des actions politiques de ces deux formations est alors apparue évidente et justifiait le nom d’ « UMPS » qui lui fut attribué par le Front National.

Mais la liste déjà longue des abandons de souveraineté ne s’est pas limitée, hélas, à l’entrée en vigueur de ces différents textes. En 2012, pour essayer de sortir d’une crise financière qui mettait en danger la monnaie unique en raison de l’endettement effarant de certains Etats membres de la zone euro, Nicolas Sarkozy a proposé un traité qui imposait aux pays de cette zone monétaire (pourtant loin d’être optimale) une « règle d’or » qui imposait à chaque Etat de diminuer drastiquement ses dépenses publiques de façon à pouvoir limiter ses emprunts et rembourser sa dette. En cas de non-respect, il était même prévu des sanctions pouvant aller jusqu’à la mise sous tutelle. Peut-on encore parler de souveraineté ?

Proposé par Nicolas Sarkozy, ce traité fut signé par François Hollande, non sans quelques minauderies préalables au cours desquelles il avait fait part de sa volonté d’en renégocier les termes. C’est l’Assemblée Nationale issue des élections de juin 2012, donc à majorité socialiste, qui ratifia ce traité le 09 octobre 2012, avec le concours des voix des députés UMP, à l’exception de celles d’une vingtaine de députés.

Ainsi donc, alors que durant plus de trente ans, ces deux « sœurs ennemies en apparence » ont fait mine de s’affronter pour la galerie, et plus particulièrement depuis 1992, Dans la réalité, elles se sont comportées, « comme deux boutiques s’approvisionnant chez le même grossiste », ainsi qualifiées par le regretté Philippe Seguin.

Elles ont toujours agi de concert chaque fois qu’un transfert ou une limitation, voire une amputation de notre souveraineté nationale, était le prix à payer pour satisfaire « l’Hydre » qu’est devenue l’Union Européenne.

Alors, dire aujourd’hui que le Front National-Rassemblement Bleu Marine présente un danger pour l’unité nationale de notre pays, et qu’il est souhaitable que le PS et le LR se réunissent en un seul parti pour pouvoir s’y opposer, relève d’une pure escroquerie intellectuelle.

Alors même que ces deux mouvements politiques ont pour objectif commun celui de détruire l’Etat puis la Nation, pour que naisse cette Europe Fédérale qu’ils appellent tous de leurs vœux, vouloir faire d’eux les gardiens de l’unité nationale est purement surréaliste.

Les dernières élections ont montré le succès grandissant du FN-RBM et la désaffection progressive des électeurs envers le PS et le LR. Ceci témoigne d’une incontestable prise de conscience du danger de voir disparaître notre nation.

Monsieur Hollande, si vous voulez préserver l’unité nationale, dont –faut-il le rappeler- vous êtes garant, faites en sorte que vos actes témoignent clairement de votre attachement à la Nation qui vous a porté au pouvoir.

Jean Goychman